00H00

Cette nuit j’ai pleurĂ©, pourquoi ? Je ne sais mĂȘme pas, ou je prĂ©fĂšre ne pas savoir, j’ai regardĂ© la tĂ©lĂ© toute la nuit, je me suis crevĂ© les yeux et les tympans Ă  Ă©couter une rediffusion du discours d’Obama, je me suis revu il n’y a pas longtemps, enfin il n’y a pas si longtemps
 Je devrais ĂȘtre heureux, mais je ne le suis pas, je ne sais pas, je ne me sens pas en confiance, j’ai l’impression qu’il y a un truc, je ne sais pas quoi, ça me fait froid dans le dos, mĂȘme dans les veines, en fait je suis en train de perdre mon identitĂ©, j’ai dĂ©jĂ  perdu mon accent qui m’était si cher,  oui tout commence, je me fĂ©minise de plus en plus, la seule chose qui reste, c’est mon mal-ĂȘtre, ce mal-ĂȘtre qu’à force de sourire et de jouer un rĂŽle dans la comĂ©die de la vie on oublie, oui j’oublie que je ne suis pas bien et je me persuade que je suis ce jeune homme grand et souriant qui a la pĂȘche, ce grand gars qui se coiffe bizarrement, qui a une tĂȘte dĂ©formĂ©e et des yeux mal dessinĂ©s, mais qu’à force de regarder on trouve charmant, oui ça je ne pourrai jamais le changer, je ne supporte tellement pas qu’on me critique pour ma mauvaise humeur ou mon manque de sourire, donc je joue, je fais l’homme qui va bien et qui n’a pas de problĂšmes, je fais comme si je n’avais jamais Ă©tĂ© violĂ©, j’oublie toutes ces annĂ©es de torture ou plutĂŽt je fais semblant de les oublier car elles sont lĂ , elles sont tracĂ©es sur moi, j’en ai les marques,  physiques et psychologiques, il suffit de lever un peu brusquement la main et je me mets Ă  trembler, il suffit de me toucher un peu trop et je me glace, toutes ces rĂ©actions que personne ne peut comprendre !    

En fait c’est ça qui me dĂ©truit, oui c’est ça, car j’aimerais tant que l’on me prenne dans les bras sans que je pense au reste, j’aimerais tant regarder une personne dans les yeux sans me dire que on ne devrait pas me regarder tellement mon intĂ©rieur est laid, oui il est laid de honte, honte d’avoir fait le trottoir, honte de la drogue et de ses effets, honte des consĂ©quences que je paye aujourd’hui.

Et puis il y a cette impression d’amour inexistant, comme si jamais je ne pouvais ĂȘtre aimĂ©, comme si jamais on ne pourrait m’aimer, comme si jamais je ne pouvais ĂȘtre dĂ©sirĂ© pour mon intĂ©rieur et non pour mon extĂ©rieur, ça me fait mal, ça me ronge, ça attaque chaque cellule de mon corps, oui chaque millimĂštre de mon corps est brĂ»lĂ© par ce manque d’amour, cet amour que je n’ai jamais eu, ce manque d’affection immense, cet amour chaotique, ce sentiment de nĂ©ant, cette rage et cette haine permanente !

VoilĂ  mon problĂšme, voilĂ  ce que je suis, un garçon en manque de « je t’aime Â» et de cajoleries, un petit bonhomme qui ne connait pas les compliments sans arriĂšre-pensĂ©e ou sans compensation,  je suis cet adulte enfantin, ce semblant d’homme qui n’en n’est pas tant un, je suis ce corps immense qui par sa taille mesure sa perte de sentiments, qui par sa grandeur comprend sa laideur affective, je suis ce mec mal proportionnĂ©, qui Ă  force d’ĂȘtre battu n’a plus la force de se battre !

Je ne sais pas si je devrais encore croire en la vie, je ne sais pas si l’espoir devrait ĂȘtre partie remise une nouvelle fois, je ne sais pas si un jour mes rĂȘves d’enfant attardĂ© se rĂ©aliseront.

J’ai encore envie de pleurer mais je n’ai plus la force de pleurer, je ne pleure que quelques secondes, je ne sais mĂȘme pas pourquoi, probablement parce que je n’ai jamais eu le droit de pleurer, probablement parce que mes pleurs sont toujours calculĂ©s, ces gouttes ne viennent que parce que je ne peux plus les retenir, parce qu’elles sont toujours prĂ©sentes mais je les garde autant que je le peux, je les conserve dans leur Ă©crin, comme des perles prĂ©cieuses, je ne les dĂ©voile jamais, par peur de ne pas ĂȘtre compris, par peur de la peur ! Mais quand j’ouvre cette bijouterie ça brille de mille feux, ça coule pendant des secondes entiĂšres, quelques secondes de rĂ©pit que je m’autorise, quelques secondes oĂč je me remets en question et me redis que mĂȘme dans ces moments-lĂ  il n’y a que la solitude pour m’accompagner. Et lĂ  ces perles et ces pierres prĂ©cieuses coulent, elles coulent lentement sur mes joues pour retourner dans mon corps, car elles finissent toujours sur mes lĂšvres, puis j’essuie le tout avec mes mains pour que rien ne paraisse, pour que rien ne se voie, pour que personne ne se doute de ce mal-ĂȘtre permanent, juste parce que les gens n’aiment pas se soucier de la douleur des autres par peur d’incomprĂ©hension !

6 commentaires sur “00H00

  1. Expression d’une douleur des plus rĂ©aliste ! On a envie de prendre dans les bras la victime pour lui dire qu’on l’aime.

  2. J’aime beaucoup votre blog. Un plaisir de venir flĂąner sur vos pages. Une belle dĂ©couverte et blog trĂšs intĂ©ressant. Je reviendrai m’y poser. N’hĂ©sitez pas Ă  visiter mon univers. Au plaisir

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icÎne pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez Ă  l’aide de votre compte WordPress.com. DĂ©connexion /  Changer )

Photo Google

Vous commentez Ă  l’aide de votre compte Google. DĂ©connexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez Ă  l’aide de votre compte Twitter. DĂ©connexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez Ă  l’aide de votre compte Facebook. DĂ©connexion /  Changer )

Connexion Ă  %s